Le président du CNT (conseil national de transition) libyen, ancien ministre de la Justice de Kadhafi, a annoncé dimanche la libération de la Libye. La prise de contrôle de l’ensemble du territoire libyen, comme la mort de Kadhafi, ouvrent, personne ne peut en douter, une nouvelle ère pour la Libye et les foules en liesses à Benghazi, Mistrata et Tripoli démontrent que les forces rebelles disposaient d’un réel soutien. Mais la résistance acharnée des « kadhafistes », notamment à Syrte, montre aussi que le régime déchu avait également des partisans et ne s’appuyait pas uniquement sur l’armée et les forces de répression.
Kadhafi, l’enfant chéri ces dernières années des Etats-Unis et de l’Union européenne, est donc mort, son cadavre jeté sur un matelas de fortune dans un centre commercial de Mistrata. On ne sait pas encore combien de victimes a fait la guerre civile de huit mois qui vient de se clore, ni combien de morts ont fait les bombardements de l’Otan, censés protéger les populations civiles.
L’Otan, plus personne ne peut le nier, est, en fait, intervenue dans une guerre civile au profit d’une des parties et le ministre russe des affaires étrangères, Serguei Lavrov, a raison de souligner que le mandat donné par l’ONU n’a pas été respecté.
Les circonstances de la mort de Kadhafi ressemblent bien à une liquidation extra judiciaire. Les propos du président du CNT évoquant la charia méritent réflexions. Qu’un pays musulman affirme que sa loi doit être basée sur les valeurs de la charia, cela peut se comprendre. Seulement, Mustapha Abdeljalil ne s’est pas arrêté là. Il a annoncé que les lois contraires aux valeurs de la charia seraient abolies. Et les premières lois dont il a annoncé l’abrogation sont celle autorisant les femmes à demander le divorce et celle qui interdisait la polygamie.
La plupart des gens apprendront ainsi, au détour d’une proclamation, que la polygamie était interdite en Libye, qui comptait aussi nombre de lois sociales.
Il y a quelques jours les médias annonçaient que des affrontements armés avaient eu lieu à Tripoli entre kadhafistes et pro CNT dans le quartier populaire d’Abou Slim, un des plus pauvres de Tripoli. On sait aujourd’hui qu’une manifestation de soutien à Kadhafi a eu lieu, qu’elle rassemblait des fidèles à la sortie de la Mosquée et que les forces du CNT ont ouvert le feu.
Reste donc posée la question essentielle : qui a pris officiellement le pouvoir en Libye hier ? Quels sont les liens de certaines brigades armées avec les « djihadistes » ? Comment va se passer la confrontation, politique espérons le, entre ces derniers et les forces nationalistes de gauche, ou séculières, qui existent en Libye ? L’abrogation des lois sur le divorce et la polygamie laissent augurer le pire.
