Il n’y a rien de pire que ce qui se passe actuellement. Le directeur général du FMI, candidat putatif à la présidence de la République, en prison, inculpé, entre autres, d’acte sexuel illicite et de tentative de viol. La presse internationale, mais surtout, on s’en doute, française, qui se déchaîne, qui alterne, comme les médias télé ou audiovisuels, les éditions spéciales, les logorrhées à n’en plus finir.
Les guerres qui pointent leur nez en Afghanistan toujours et plus proche de nous en Libye, sans oublier l’intervention française en Côte d’Ivoire.
La violence des propos xénophobes et des actes gouvernementaux allant dans ce sens en Europe, et particulièrement en France. Une régression sociale encouragée par des ministres et non des moindres. Un parfum des années trente quand le fascisme se voulait la réponse autoritaire –et démagogique- à la crise.
Pour la prochaine présidentielle, on n’aurait donc le choix qu’entre le déballage sordide de ce qui se serait déroulé dans la suite n° 2806 de l’hôtel Sofitel de New York et la naissance annoncé de l’enfant du président…
Le climat est malsain et délétère. Il est donc dangereux.
L’affaire DSK mérite cependant qu’on s’y arrête puisqu’elle est devenue un enjeu politique. Rappelons d’abord que le viol est un crime et qu’il ne s’agit pas là, comme avait cru pouvoir le dire un journaliste de France Info, de « frasques ». Il ne s’agit pas non plus de faire de l’ancien ministre socialiste des finances un coupable en puissance à cause de sa vie sexuelle réelle, supposée ou fantasmée. Personne, comme l’a souligné avec justesse le porte-parole des députés communistes, Roland Muzeau, ne sait ce qui s’est réellement passé dans la fameuse suite à l’exception de deux personnes : Strauss-Kahn lui-même et son accusatrice.
Nous ne jouerons pas au petit jeu des contradictions des uns et des autres, mais soulignons encore deux choses. Certains soutiens socialistes de DSK et une partie de la droite musclée tombent dans les mêmes travers. Une défense sans nuance d’un côté, des attaques perfides de l’autre. Ces deux attitudes discréditent la politique.
La deuxième chose concerne la justice américaine. Les uns nous disent que celle-ci est égalitaire puisqu’elle traite de la même manière les puissants et les moins fortunés. Les autres nous parlent avec terreur du cynisme de cette même justice. Rappelons le : la justice américaine est une justice accusatoire. C’est à l’inculpé de faire preuve de son innocence à la différence du droit français où c’est à l’accusation de prouver le crime ou le délit. Cette pratique américaine est en elle-même inégalitaire. Car les plus riches peuvent débourser pour des avocats et organiser de véritables contre-enquêtes, négocier avec les autorités, engager des détectives privés, des enquêteurs etc. Cette justice-là se rend coupable de nombre d’erreurs judiciaires et les couloirs de la mort sont remplis d’hommes dont on s’aperçoit parfois trop tard qu’ils sont innocents. En général, ces hommes-là ne sont pas des riches.
Revenons à la politique. L’éditorial de Nicolas Demorand, dans Libération demandant des « primaires, vite » fait un peu froid dans le dos. Ce ne sont pas des primaires dont ont besoin les électeurs et les électrices, mais d’une alternative politique claire.
Que vont faire demain les ministres socialistes, si la gauche arrive à reprendre le pouvoir, (mais rien n’est moins sûr) ?
Il semble bien établi que DSK ne sera pas candidat. Évidemment, cela change quelque peu la donne (mais là aussi les médias exagèrent, rien ne dit que Strauss-Kahn aurait été candidat aux primaires, et rien ne dit non plus qu’il aurait été désigné par le PS). Mais d’autres choses, à gauche, changent la donne. D’abord, l’annonce par Besancenot qu’il ne sera pas candidat et la fracture au sein du NPA où une forte minorité (près de 44%) se prononce pour continuer les discussions avec le Front de gauche pour ouvrir une alternative. Ensuite, par l’annonce de Jean-Pierre Chevènement qu’il sera candidat, mais cette dernière peut tomber d’elle même avec l’effacement forcé de DSK.
En tout état de cause, il est sans doute un peu trop tôt pour les formations du Front de gauche de désigner leur candidat, même si les jeux ont l’air d’être fait. La gauche de transformation sociale aurait plutôt intérêt à mobiliser autour d’alternatives, de programme politique, de luttes et de propositions ; de construire un rassemblement pouvant déboucher sur une candidature plutôt que de faire l’inverse, alors qu’il faut bien le dire, la candidature de Jean-Luc Mélenchon ne suscite guère d’enthousiasme, à tort ou à raison. La personnalité ne perce pas. Il n’incarne pas le monde du travail. Il ne personnifie pas le changement, ni en termes de génération au sens biologique du terme, ni en terme politique. Cela ne signifie pas qu’il faille un candidat communiste pur jus, que cela serait même une erreur.
Il faut élargir le Front de gauche et faire jouer à toutes ses composantes leur propre rôle.
Bref, dans cette campagne présidentielle qui risque de voir déferler des torrents de boue et la démagogie de l’extrême-droite, entretenue d’ailleurs par le président de la République et ses chevau-légers (Guéant d’un côté, les députés qui, par antiphrase, s’intitulent la droite populaire), il est bien temps de faire vivre une alternative politique crédible qui s’adresse d’abord, mais pas exclusivement, au monde du travail, comme les communistes avaient réussi à en être les initiateurs au moment du Front populaire.
Un mot encore sur le déchainement de la droite, notamment sur ceux qui, à partir du cas DSK, s'en prennent sur le fond à la gauche. Faut il leur rappeler que les violeurs sont de toutes orgines politiques, sociales, etc. En mai 2003 c'est un conseiller municipal UMP de Neuilly-sur-Seine qui est arrêté; un maire UMP de Seine et Marne, est arrrêté en juin 2004; un conseiller municipal UMP des Pyrénées Atlantiques, arrêté en avril 2004... Tous, dans des affaires différentes, sont mis en examen pour viols. La liste n'est malheureusement pas exhaustive. Et personne n'a dans ces cas là mis en cause les idées politiques de ces élus.